Originaire de la rive orientale de la Méditerranée, l'écrivain francophone Kateb Yacine a apporté un regard neuf à la langue littéraire française à travers la création d'un univers interculturel.
Le Maghreb possède une tradition berbère dans la mesure où son histoire est fondamentalement "amazigh". Les berbères revendiquent une présence au Maghreb vieille d'environ 5000 ans. Faisant partis du monde rural, surtout montagnard, ils constituent le substrat ethnique et socioculturel de l'Afrique du nord auxquelles sont venues s'ajouter les composantes juive, arabe et chrétienne.
Les berbères n'ont jamais livré bataille en agresseur mais en résistant, défendant leur liberté et refusant de vivre sous domination. Etymologiquement, "amazigh" signifie "homme libre". C'est une histoire qui s'étend dans l'espace et dans le temps.
Kateb Yacine est issu d'une famille de lettrés berbères "Chaouis" appelée "Keblouf". On retrouve dans l'oeuvre de l'algérien Kateb les trace de l'histoire collective qui ont marqué son existence. Son histoire personnelle commence pendant le soulèvement du 8 mai 1945 à Sétif. Les manifestations dans les rues de Sétif, Kherrata et Constantine réprimées dans la violence causent la mort de 45000 personnes. Ce drame sonne le glas de l'ère colonial et plonge l'Algérie dans la tragédie nationale. Sa vocation pour l'écriture vient de là, ou peut-être de son nom prédestiné, Kateb signifiant "écrivain" en arabe.
Dans "Le Polygone Etoilé", Kateb retrace l'épisode colonial, la condition des travailleurs précaires et l'arrivée au pouvoir du parti unique et de l'armée. Il dépeint la situation dans laquelle se trouvent la société algérienne.
Ce qui nous intéresse particulièrement dans cette oeuvre autobiographique, c'est la relation que Kateb entretient avec la langue française. Il apprend le français dans le contexte de la colonisation française en Algérie. Le rapport à la langue n'est pas le fait d'un choix culturel mais d'une acculturation. On retrouve la double caractéristique à la fois d'enfermement et d'ouverture dans "Le Polygone Etoilé". Ce qu'il appelle "son exil intérieur" est le bouleversement des rapports avec sa mère. Son père le force à aller à l'école française, "la gueule du loup" comme il l'appelle. Cela l'obligera à refouler sa langue maternelle pour celle du colonisateur dont la parfaite maîtrise sera son seul espoir de pouvoir revenir à ses racines.
"Laisse l'arabe pour l'instant. Je ne veux pas que, comme moi, tu sois assis entre deux chaises" lui dira son père.
Mais l'émergence de cette rupture avec les origines ancestrales lui fera perdre son lien intime avec sa mère c'est-à-dire avec sa langue maternelle au cours de son enfance : "(...) cet exil intérieur qui ne rapprochait plus l'écolier de sa mère que pour les arracher, chaque fois un peu plus, au murmure de sang (...). Ainsi avais-je perdu tout à la fois ma mère et son langage, les seuls trésors inaliénables - et pourtant aliénés !"
Son désir sera donc de maîtriser la langue française afin de pouvoir la posséder pour mieux se libérer d'elle. Il entretient alors avec elle une relation ambiguë, devenant "son double féminin".
Finalement forcé à l'exil par le régime militaire algérien, Kateb choisira l'errance entre les deux langues, l'arabe et le français. Il deviendra alors un écrivain interculturel et fera voler en éclat les modèles occidentaux et orientaux de l'écriture. Sous sa plume, le français se transforme en un langage hybride et pluriel, tourné non plus vers le passé mais vers l'avenir.
Finalement forcé à l'exil par le régime militaire algérien, Kateb choisira l'errance entre les deux langues, l'arabe et le français. Il deviendra alors un écrivain interculturel et fera voler en éclat les modèles occidentaux et orientaux de l'écriture. Sous sa plume, le français se transforme en un langage hybride et pluriel, tourné non plus vers le passé mais vers l'avenir.
J'éprouve un grand respect pour ces écrivains du Maghreb !oui ils ont su...exprimer le déchirement de leurs peuples entre traditions et colonisations et dire non,en hommes révoltés, non à l'exploitant !mais la mission est-elle terminée?Oui et non!qui oubliera l'honorable président-poète Bourguiba ,Rachid Boudjedra,Tahar Ben Jelloun,Mohamed Dib,Driss Chraïbi et j'en passe!Honneur en tout cas comme tu l'as su faire, Aleksia ,à Kateb Yacine!
RépondreSupprimerJe n'ai pas encore lu Kateb Yacine. Ton billet donne en tout cas tres envie de le decouvrir.
RépondreSupprimerMerci pour ton petit mot sur mon blog.
A bientot.